lundi 29 octobre 2012

Humeur

« Ces Jeux ont été de grands Jeux »

Découvrez notre deuxième volet de l’interview consacrée à Mickaël Bourgain, spécialiste français du keirin, qui revient sur les derniers Jeux Olympiques auxquels il a participé. 

L’organisation, l’engouement, les performances, tout y est évoqué, sans tabou et avec beaucoup de réflexion.

Bonjour Mickaël. Nous allons profiter de cette interview pour évidemment revenir sur les JO de Londres, mais aussi pour parler de votre futur et de votre activité au sein de la SNCF.

Mais commençons tout d’abord par les Jeux Olympiques...

Beaucoup de spectateurs et d’experts ont dit que ces Jeux ont été parmi les meilleurs de l’histoire. Que pensez-vous de l’organisation de ces Jeux ? En termes de logistique ? De conditions dans le village olympique ? Quel est votre ressenti par rapport à l’organisation de ces Jeux ?

Oui, en effet ces Jeux se sont très bien passés, l’organisation était très bonne. Après c’est vrai qu’à titre de comparaison avec Pékin, je pense que les chinois aussi avaient réussi leur JO. Pour Londres, je ne dirai pas que c’est mieux, mais disons qu’ils ont pu égaler ce qui s’était fait à Pékin. Mais c’étaient des Jeux magnifiques, il n’y a rien à dire à ce niveau-là, le village Olympique était très bien et tout s’est bien passé. Ces Jeux ont été de grands Jeux.

Nous avons également constaté que les stades étaient tout le temps pleins. Vous qui avez participé à 3 campagnes olympiques, qu’avez-vous pensé de l’ambiance de ces Jeux-là ? Y avait-t-il un engouement particulier ?

Oui, surtout pour la piste. Le vélodrome était effectivement rempli et les anglais faisaient énormément de bruit, surtout lorsqu’un britannique était en lice. C’est vrai qu’il y avait un engouement très fort pour le vélodrome, on a même vu des personnalités venir assister aux compétitions sur piste. On sentait vraiment que le pays entier était derrière les pisteurs britanniques.

Et ça, c’est quelque chose que vous n’aviez pas retrouvé dans les Jeux précédents ?

Non ce n’était pas comme ça avant, c’est vrai qu’à Pékin, les gens ne s’intéressaient pas trop au cyclisme, à Athènes non plus, et là c’était exceptionnel, on sentait vraiment une nation entière derrière les athlètes et puis il faut dire que les résultats ont suivi pour eux puisqu’ils ont ramené beaucoup de médailles dans ces disciplines, ils ont presque tout gagné.

Vous nous aviez dit lors de la précédente interview que vous espériez un podium olympique et pourquoi pas l’or. Que ressentez-vous après votre prestation ?

Je termine 8ème donc ce n’est pas l’objectif, l’objectif n’est pas atteint. C’est vrai que j’avais ramené une médaille olympique à chaque olympiade à laquelle j’avais participé (Athènes et Pékin). C’est pour cela qu’à Londres, je partais avec de vrais objectifs et de vraies chances de médailles puisque j’avais terminé troisième de la coupe du monde pré-olympique en février sur cette piste à Londres, donc le podium était envisageable et la médaille d’or possible mais bon je finis 8ème.
Alors oui c’est un échec parce qu’après beaucoup de préparation, beaucoup d’entrainements lorsque l’on n'arrive pas à atteindre ses objectifs on est forcément déçu. Après c’est le sport, ce n’est jamais évident parce que le niveau est très relevé et ça se joue à pas grand-chose. C’est comme ça et maintenant il faut arriver à digérer tout ça et à passer à autre chose, mais ce sont des moments qui ne sont pas très agréables à vivre.

Lors de votre élimination en demi-finale, on vous sentait devant quasiment toute la course et puis finalement vous terminez à la 4ème place. Racontez-nous votre course et vos sensations. Aviez-vous une tactique particulière ?

Tout d'abord, il faut voir qu’il y avait dans cette série l’allemand Maximilian Levy qui était sans doute l’un des deux plus forts du tournoi, et qui était vraiment en forme et très costaud. Pour ce qui est de la tactique, je n’en avais pas une précise dans ma tête mais je n’avais pas envie de me retrouver derrière lui au moment où le sprint allait se lancer parce que je savais que ça pouvait être compliqué de le passer. 
J’ai donc décidé de prendre la tête de la course assez tôt pour pouvoir essayer de contrôler l’allemand et le laisser derrière moi. Après, est ce que je suis parti un peu tôt, ou est ce qu’il m’a manqué un peu de fraîcheur physique sur la fin de la course c’est difficile à dire, mais Maximilian Levy a bien joué le jeu, il était très costaud et est bien revenu sur moi. 
Ensuite, il a fait l’effort de me passer et d’amener dans sa roue les autres coureurs. Ces circonstances de course ont fait que je termine 4ème de la demi-finale et c’est vrai que lui a fait exprès de s’écarter un petit peu au dernier moment pour que l’australien s’intercale entre lui et moi, ce qu’il fait que ce dernier me double aussi donc voilà. Ce sont des petits détails qui font qu’au final je termine 4ème. 
On aurait recouru la course dix fois, il y aurait eu dix résultats différents…C’est vrai que ça remet en question beaucoup de choses, mais lorsqu’on regarde la course on voit que ça ne se joue pas à grand-chose.

Pour participer à l’épreuve de keirin, il fallait que vous soyez au départ de l’épreuve sur route. Cela a énormément fait jaser avant les Jeux. Que pensez-vous de cette règle qui semble quelque peu obsolète ? Cela vous a-t-il ajouté une pression supplémentaire ?

Moi dans cette décision je n’y étais pour rien, je me suis qualifié pour mon épreuve de keirin. Après la fédération a dû avoir recours à ce stratagème pour que je puisse courir le keirin. Avec le recul c’est vrai que ce n’était pas une situation facile à vivre parce que sur mes épaules reposait un résultat, tout le monde attendait une médaille au keirin, donc oui cela a ajouté une pression mais après je ne peux pas dire que c’est à cause de ça que je termine 4ème de la demi-finale et que je ne me qualifie pas pour la finale. Mais disons que c’est tellement compliqué de ramener une médaille des Jeux, qu’il faut mettre toutes les chances de son côté et on ne peut pas dire que cette situation ait été idéale. 
Après de là à savoir quelle part cette règle prend au niveau de l’échec je ne pourrais pas le dire mais c’est vrai que ce n’était pas certainement les meilleures conditions pour réussir.

Quels sont désormais vos objectifs ? Vous préparez-vous pour les prochains championnats du monde ? Dans quel état d’esprit êtes-vous actuellement ?

J’ai repris l’entrainement assez tard et là je me maintiens en forme, j’essaie de faire des exercices et des activités un peu différentes pour casser la routine. C’est très compliqué après des Jeux de se relancer, de repartir. D’autant plus qu’actuellement au niveau fédéral il y a un gros flottement, on se retrouve sans entraîneur sur la piste de Hyères, on se retrouve un peu livré à nous-mêmes. La Fédération n’a pas vraiment d’objectifs, on ne sait pas vraiment où ça va. Tout cela fait qu’actuellement c’est un peu compliqué. On essaie donc de se débrouiller et de s’entraîner pour garder un rythme et le niveau mais pour l’instant les objectifs ne sont pas clairs. Par exemple, nous ne connaissons pas les modalités de sélection pour les championnats du monde.

Quel est, de ce fait, l’emploi du temps type de Mickaël Bourgain en ce moment ?

Pour l’instant, je suis aux « 6 jours de Grenoble » jusqu’au 28 octobre, j’ai eu quelques compétitions ces deux derniers mois. Sinon, évidemment je m’entraîne tous les jours (musculation, piste) pour garder mon niveau pour ne pas repartir de trop bas lorsqu’il faudra repartir à 100%.

Avant les JO, la SNCF vous avait détaché pleinement pour votre préparation. Qu’en est-il actuellement ? Avez-vous trouvé une activité au sein de la SNCF ?

En fait mon CDD se termine le 31 octobre, c’est-à-dire ma période de détachement accordée par la SNCF, et ensuite je vais donc passer en contrat CDI,  je verrai avec Véronique Carlier, qui gère les sportifs de haut niveau, sur quel poste je pourrai être affilié. Pour pouvoir préparer mon après carrière et que je continue à m’entraîner. Pour l’instant je n’en sais pas plus, mais ça devrait bouger rapidement...

Voilà, nous arrivons à la fin de l’interview. Nous tenions à vous remercier pour votre disponibilité, votre sympathie et votre humilité, si rare aujourd’hui pour des champions comme vous. Nous vous souhaitons bonne continuation dans votre carrière et dans votre aventure à la SNCF !

Interview réalisée par Jean-Baptiste CALUCCI

3 commentaires:

  1. Super interview, bravo !

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  2. Il a la classe ce Bourgain. Il avait de l'ambition pour ces JO, il a malheureusement pas atteint son objectif et il le reconnaît sans se chercher d'excuse. C'est ça un champion !

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  3. C'est un vrai sportif comme on les aime, avec des valeurs et du respect. Il est fairplay et loin d'être mauvais perdant. Il a vraiment une belle mentalité ce Bourgain ! Si tous nos sportifs étaient comme ça... ce serait un grand bonheur, et une vraie fierté :)

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